Transcript

On va présenter un projet qu’on est en traîne de collaborer depuis quelques années, depuis 2012. C’est un projet qui s’appelle nigamon/tunai. Et nigamon en Anishinaabemowin ça veut dire “chant” et tunai en langue Inga ça veut dire “chant” aussi. Les Ingas sont un peuple autochtone en Amazonie en Colombie. C’est un projet, comme je disais, qu’on développe depuis quelques années et qui devrait être présenter dans une forme comme un spectacle ou un parcours performatif d’ici 2020. Demain spécifiquement on va présenter comme une étape de travail, la dernière étape de travail qu’on a eu, qui a eu lieu il y a un an exactement, mois de décembre d’année dernière. Et c’était – on est parti un group de quatre femmes autochtone d’ici pour aller dans la communauté de Waira en Amazonie en Colombie pour faire les illustrations de livre qu’elle a écrit et qui va être publier en 2019. Et ce livre s’appelle “La vida es una pinta” or “Life is but a vision” et qui raconte ses expériences de quand elle était enfant avec son père, ses grands-pères, ses arrière-grands-parents en cérémonie. Donc c’est toute des histoires basées sur ses expériences en cérémonie. Et quand est allé il y a quatre ans, j’y suis allée avec une artiste visuelle qui est basée ici à Montréal, mais qui est Anishinaabe qui s’appelle Glenna Matoush. Et Glenna avait donné un atelier d’art abstrait aux enfants et les avait guidé à peinturer leurs visions en cérémonie. Parce qu’ils prenaient une médecine qui fait voire beaucoup des choses. Et suite à cet atelier, Waira lui avait demander si elle pouvait faire les illustrations de son livre. Mais comme Glenna ne vient pas de ce territoire puis elle fait allusion à la médecine, aux serpents, à tout l’environnement fait de son territoire, Glenna se sentait pas à l’aise de faire les illustrations, mais elle a proposé de guider les enfants pour que ça soit les enfants qui fassent les illustrations.

Waira est moi on fait partie du Consortium pour la politique et la performance dans Amériques et c’est comme ça qu’on a rencontré Kim [Sawchuk] entre autres. L’année dernière à Winnipeg on y avait comme une rencontre avec tous les partenaires, donc des différents universités au Canada, on a présenté comme une performance, une conversation performative sur le projet où on a été jusqu’à présent. Et suite à ça les universités se sont mis ensemble pour nous aider à  financer cette étape de travail. Que, c’est une étape, je pense ça va être super riche de présenter cette étape parce que Glenna est une artiste visuelle de nom qui est plus âgée, qui est dans la soixante dizains puis quelques années est devenue aveugle. Toute une histoire aussi pour une artiste de s’est déplacée jusqu’en Amazonie en étant aveugle, et surtout de guider des enfants pour produire des illustrations pour un livre. Donc c’est un peu toute cette expérience-là qu’on va partager. Malheureusement, Waira qui est que l’auteur du livre et ma collaboratrice dans le projet ne peut pu voyager parce que sa mère est super malade. Dans le cas de Glenna, comme j’ai dit, Glenna donc est en traîne de perdre la vue. Elle voit dans sa para-vision, elle voit des choses, elle voit des couleurs aussi, mais pour nous, enfin pour moi, ça était très intéressant de la voir, de la côtoyer comme ça à ce niveau parce qu’elle voit d’une façon différent. Elle voit avec ses mains, elle voit le mouvement, elle, sa vue s’est développée d’une autre façon. Et je pense ça était une inspiration aussi pour les gens en Amazonie de voir à quel point elle pouvait quand même être autonome. À moment donné on a fait comme un gros trekking dans la jungle en Amazonie. Elle apprenait avoir des yeux. On est, nous on était ses yeux ou… Elle a réussi a vivre toutes ces expériences et ça n’a pas été un frein pour qu’elle puisse les vivre donc je pense elle était une inspiration pour tout le monde. Et pense que peut-être dans la cosmovision autochtone il y a aussi d’autres façons de voir aussi par exemple en cérémonie qui puissent nous aider à voir l’invisible aussi et… Et je pense que en tant qu’artiste cette dimension-là aussi qui nous inspire à créer.

Ben, je pense que c’est comme ça dont je parlais, tsé, comme c’était je veut dire Glenna elle était toujours en traîne d’observer le monde autour d’elle. Mais, ah, c’était vraiment fascinant de voir comment elle le voyait, même si sa vue n’est pas optimale comme la mienne ou comme des gens qui voient bien. Qu’elle arrivait tsé à saisir le mouvement, elle est capable de sentir le vent dans les arbres ou l’énergie de la rivière ou tsé. Donc elle, c’était vraiment intéressant puis quand Waira est venue à l’été 2017 ici à Montréal puis qu’elle avait dit “bon finalement on a reçu le financement on pouvoir faire le livre” et elle a demander à Glenna “peux-tu faire les illustrations de mon livre? On va le faire”. Et là Glenna a dit à Waira “Mais Waira j’ai perdu la vue entre temps, je ne peux plus faire”. Et Waira a totalement insisté, elle avait dit “non, mais tu vois autrement, tu vois avec tes doigts, tu vois, tu vois avec ton imagination, et la médecine va t’aider à voir plein de couleurs. J’y retourne en Amazonie.”  Et je pense que si on devait retourner, si on avait l’opportunité d’y retourner, Glenna y retournerait…absolument.

Je pense que c’est de voir, d’entendre l’histoire de Glenna, de voir qu’elle était capable, donc j’ai l’impression que cette expérience-là, ben en fait là je parle pour elle mais faudrait l’entendre en parler mais j’ai l’impression que ça lui a donné beaucoup confiance en elle puis ça lui a donné l’envie de se remettre à peintre aussi parce que ça était, des fois il faut, il faut prendre des petits risques pour voir, réaliser que, qu’on est capable de faire des choses qu’on pensais peut-être pas être capable de faire. Donc je pense ça était une grande leçon pour tous de voir Glenna, c’est plus que d’être capable, c’est je veut dire le résultat des peintures sont magnifiques. Il y a eu une expo cette année en Colombie des images, comment on est capable de transmettre ses connaissances, son expertise malgré le fait qu’on est, qu’on a plus le même capacité qu’on avait avant. Cette une belle leçon je pense pour non seulement des gens qui ont, qui se sent limité dans leur sens, mais aussi pour tout le monde. Pour moi c’était une grande inspiration. Là-bas aussi elle a été um.. surtout on est arrivé dans un contexte où y avait beaucoup de tristesse, suite au meurtre de frère de mon amie. Et bon cet un contexte politique très difficile dans cette région de la Colombie. Y a une montée de paramilitarisme en Colombie en ce moment très fort aussi. Des compagnies minières qui essayent de s’accaparer des territoires. Et de plus en plus de meurtres de leaders communautaires. On est arrivé dans un moment ou c’était très fort tous ça, cet environnement-là. Et de voir qu’on arrive là et qu’on était heureuse de faire un projet artistique, d’être dans la création que Glenna s’émerveillée de tout, je pense que ça était comme un baume, une expérience qui était comme un baume pour tous en fait. C’était un cadeau je pense d’avoir Glenna impliquée dans le projet.

Je me base un peu sur des conceptions autochtone de base, tsé, y a comme un, on parle souvent c’est un passé circulaire, les cosmovisions autochtones. Puis ça veut dire aussi que chacun à une place dans un cercle sacré finalement et que chacun a son unicité et son importance dans le cercle, sa place dans le cercle que de la même façon que les aînés sont super importants et respectés dans nos communautés, mes enseignements traditionnels. Ça va de la même chose avec des individus qui on des – je ne sais pas si on peut appeler ça des déficiences, ça je trouve que ça deviens même un mot occidental un peu parce que peut-être que c’est des gens qui ont certains dons, peut-être d’être limité d’un sens leur permettre d’être beaucoup plus sensible sur d’autres sens, et d’avoir à accès à autres ponts de la réalité. Peut-être que c’est de transformer ça et de voir que au lieu d’être une déficience c’est peut-être un, aussi un apport en fait ou un don qu’ils ont de percevoir les choses autrement. Donc ça serait d’être dans une société qui permet de reconnaitre ça ou de laisser la place à ça pour que tout le monde se sent sur le même pied d’égalité.

Bio

At the intersection of theatre, performance and media arts, the practice of Émilie Monnet centres on questions of identity, memory, history and transformation. Her works privilege collaborative processes of creation, and are typically presented as interdisciplinary theatre or immersive performance experiences. In 2011, she founded ONISHKA with the aim of creating shows born from unique collaborations between artists of different cultures and disciplines. As a playwright and director, she is the artist in residence at Centre du Théâtre d’Aujourd’hui until 2021. This Time Will Be Different, her most recent installation performance co-created together with choreographer Lara Kramer, will be presented at FTA this coming June (2019). Since 2016, she produces Indigenous Contemporary Scene (ICS), a nomadic platform for the presentation of live arts and creative exchanges between Indigenous artists and communities. ICS’s upcoming edition will take place in Edinburgh, Scotland, next August. Émilie’s heritage is Anishnaabe and French and and she lives in Tiohtià:ke / Mooniyaang / Montréal.


Au croisement entre le théâtre, la performance et les arts médiatiques, la pratique artistique d’Émilie Monnet s’articule autour des questions d’identité, de mémoire, d’histoire et de transformation. Ses spectacles puisent dans la symbolique des rêves et des mythologies – personnelles et collectives – pour raconter des histoires qui interrogent le monde d’aujourd’hui. En 2011, elle fonde ONISHKA  dans le but de créer des spectacles nés de collaborations uniques entre artistes de différentes cultures et disciplines; puis en 2016,  Scène contemporaine autochtone (SCA), une manifestation artistique et critique faisant place à la création autochtone en arts vivants. Une version réduite de SCA était présentée à Buenos Aires en mars 2017 et réunissait des artistes autochtones du Québec et de l’Argentine. De mère anishnaabe et de père français, Émilie vit à Montréal. Son engagement artistique s’inspire de nombreuses années d’activisme auprès d’organisations autochtones (Canada et Amérique Latine), et de sa participation à des projets artistiques avec des femmes judiciarisées et jeunes autochtones.